Malgré plus de 60 ans de négociations - la convention de Yaoundé en 1969, les accords de partenariats de Cotonou en 2000 entre les pays APC* et l’Union Européenne et plus récemment les Accords de Partenariats Economiques (APE) - les accords commerciaux entre Nord et Sud continuent de menacer la sécurité alimentaire des populations rurales des pays en développement.
Aujourd’hui, l’impact des APE ne doit pas être négligé. En effet, la pression sur les pays en développement est réelle car l’ouverture sur des marchés internationaux les oblige à faire face à des défis majeurs. Ces accords visant à appuyer le développement des pays APC peuvent s’avérer être une menace pour leur économie, leur agriculture, leur sécurité alimentaire, et plus globalement pour leur autonomie politique.
La libéralisation du marché et la création de zones de libre-échanges de produits agricoles entre les pays africains et européens comportent des risques majeurs. D’une part, par la différence de productivité et de compétitivité entre les deux types d’agricultures : d’une manière générale, la productivité de l’agriculture africaine manuelle est bien inférieure à celle de l’agriculture française mécanisée.
D’autre part, l’agriculture européenne bénéfice de politiques et de financements publics favorisant une compétitivité déloyale surtout vis-à-vis des productions vivrières des pays ACP (PCAC 2014, 9.1 milliards d’euros de subventions publiques pour la France). Les pays européens peuvent ainsi commercialiser leurs produits à des prix inférieurs aux coûts de production des pays APC, ou exporter à prix faibles les sous-produits agricoles (ex : abats de volaille).
Au-delà des impacts sur les productions agricoles locales dont dépendent une grande partie des revenus des populations rurales, une substitution des approvisionnements nationaux et régionaux par des approvisionnements européens augmenterait la dépendance des pays africains vis à vis du marché mondial et occasionnerait plus de vulnérabilité.
L’enjeu à moyen terme est donc de satisfaire cette demande par une production locale et non importée. Pour cela, les pays APC doivent adopter des politiques commerciales plus protectrices, négocier l’exclusion de certains produits agricoles des accords APE, obtenir et développer davantage d’aides financières pour s’adapter à ce nouveau contexte concurrentiel.
* Pays APC : Afrique, Pacifique et Caraïbes
Par Thibault Queguiner, Chargé de programmes
Sources :
• «Accords de Partenariat Economique et agriculture : quels enjeux pour l’Afrique ?» Coordination Sud, 2014
• «Accords de partenariat économique : Présentation, analyses, points de vue» n°39, Revue Grain de Sel 2007
• Produire local pour consommer local